Agnès Moreau
A propos de moi...
« Psychologue de l’Education nationale depuis septembre 2017, je suis en poste à mi-temps au Centre d’Information et d’Orientation (CIO) du Mirail et à mi-temps au Service Commun Universitaire d’Information, d’Orientation et d’Insertion (Scuio-IP) de l’Université Toulouse-Jean Jaurès.
Sur chacun de ces postes, mon rôle est d’accompagner les personnes dans leur réflexion sur leur projet d’orientation et d’insertion professionnelle ; c’est une fonction de conseil et d’accompagnement que j’exerce en tant que psychologue ; il y a une posture et des connaissances de psychologue sur lesquelles s’appuie la pratique de conseiller en orientation.
Je suis Psychologue de l’Éducation nationale (PsyEN), spécialité Edco (Éducation Développement Conseil en Orientation). Ce poste correspond à un référentiel récent qui date de 2017, qui définit nos fonctions et sur lequel je reviens régulièrement : nous sommes les seuls psychologues Éducation nationale à intervenir dans le second degré, avec des missions qui sont très larges. Nous avons une mission de conseil en orientation ; mission sur laquelle nous sommes le plus repérés et sur laquelle nous sommes spécifiquement formés au cours de nos deux années d’études. En tant que psychologue, nous avons également une mission sur la question des apprentissages et de la remédiation aux difficultés d’apprentissage, la prise en compte et l’accueil des élèves à besoins particuliers, la prise en compte de la souffrance psychique du jeune. »
Mon parcours après le bac...
« À l’issue du BAC, je n’avais pas d’idée professionnelle très précise. J’étais plutôt bonne élève, bonne élève partout. (…) et donc j’ai fait une préparation Ecole de Commerce où je retrouvais les matières que j’aimais au lycée. C’était en un an à l’époque et j’ai ensuite intégré l’École Supérieure des Sciences Économiques et Commerciales (ESSEC) : une école de commerce où l’on fait plutôt du management. Cette formation m’a permis de travailler sur le développement social du quartier, sur la politique de la ville ; j’ai travaillé dans ce domaine-là pendant cinq ans, en bureau d’étude et en organisme HLM.
Et puis je suis devenue maman, j’ai fréquenté une halte-garderie parentale. Je crois que le projet que j’avais -et qui n’avait pas pu vraiment s’exprimer durant mes années de lycée- d’aller vers la psychologie, la psychologie du développement s’est affirmé. Et du coup, j’ai décidé de repartir en formation. J’ai demandé des équivalences, j’ai pu faire les deux premières années en une et j’ai recommencé mon cursus en psychologie. Je me suis spécialisée, petit à petit, en psychologie du développement et en psychologie clinique et ensuite au niveau des choix de la cinquième année (qui ne s’appelait pas encore master), mon choix s’est porté sur le DEA.
J’ai un très bon souvenir de la formation ; je me suis quand même beaucoup régalée de tout ce que j’ai appris en psychologie, en particulier en psychologie du développement et en clinique, régalée de ce qui m’a été transmis par les enseignants et de ce que j’ai pu lire en parallèle. Par exemple, la rencontre avec H. Wallon était intéressante parce que cela correspondait un peu à la façon dont j’avais déjà appréhendé les choses sans support théorique.
Donc là, il y avait de la jubilation intellectuelle. Et puis de la complicité intellectuelle avec certains enseignants, surtout en développement, parce que je pense, cela me correspondait bien. La clinique m’intéressait beaucoup mais quelque chose restait un peu complexe, un peu inaccessible. »
La sortie de la formation ... thèse ou pas thèse ?
« L’enseignante qui me suivait en DEA et qui, je pense, avait idée que je pourrais poursuivre en thèse, m’a mise en contact avec le Centre Communal d’Action Sociale (CCAS) de Toulouse avec lequel l’université travaillait régulièrement parce que c’était un terrain de recherches et d’expérimentations. Le CCAS, c’était 13 crèches à l’époque, des crèches traditionnelles, avec des capacités d’accueil de 60 places. Et dans ces crèches, il y avait des puéricultrices, des éducatrices, mais pas du tout de psychologues. Et donc un besoin de psychologues !
La demande initiale consistait en un soutien aux équipes face à des situations difficiles, à partir de mes observations sur les enfants de la crèche. Ensuite se sont greffées des demandes de formations du CCAS, puis des demandes d’intervention autour de projets de crèches… Et puis, il y a eu un événement qui a compté chez les psychologues de Toulouse : la catastrophe AZF ! J’ai commencé à travailler en février 2001 et le 21 septembre 2001 est survenue l’explosion d’AZF. Beaucoup de crèches de Toulouse ont été touchées, c’était un gros traumatisme. Philippe Douste-Blazy, le maire de Toulouse de l’époque, a appelé les psychologues pour soutenir la population. A ce moment-là, je ne me sentais pas encore pleinement psychologue mais, quand même très affectée, je suis intervenue en soutien psychologique dans les crèches.
J’ai donc commencé à travailler pour les crèches du CCAS. J’intervenais à la demande des directrices, pour observer un enfant et travailler avec l’équipe autour de la prise en charge de cet enfant. Mes missions se sont ensuite étendues. J’ai assuré des formations pour les équipes de ces mêmes crèches. Je dépendais du Centre National de la Fonction Publique Territoriale (CNFPT) et je suis devenue formatrice auprès de cet organisme. Avec le CCAS, on avait travaillé sur la communication en équipe, le soutien à la parentalité et puis on avait mis en place des groupes d’analyse de pratiques dans certaines crèches. J’ai ensuite développé cette activité d’analyse de pratiques auprès d’autres structures.
(…) J’avais plusieurs employeurs : au départ, le CNFPT presque exclusivement. Puis le statut d’autoentrepreneur ayant été créé, j’étais à la fois salariée du CNFPT et auto-entrepreneuse. Avant que le statut d’autoentrepreneur n’existe, j’avais pris une solution de portage salarial. J’ai donc un peu tout expérimenté. »
Mon poste actuel
« J’avais pensé au métier de Conseiller d’Orientation Psychologue pendant mes études en DEA (…). Mais à l’époque, j’avais 4 enfants en bas-âge et quand j’ai évoqué le projet de passer le concours et de retourner en formation loin de chez moi, on m’a rapidement fait comprendre que ce n’était pas le moment de le faire. J’ai oublié ce projet, mais peut-être pas totalement finalement. J’ai développé mon activité dans la petite enfance qui m’a intéressée et convenu pendant une quinzaine d’années. Et puis il y a trois ans, j’ai ressenti une sorte de déclin, à la fois dans le volume d’activité que j’avais et sur l’intérêt que j’y portais également. J’ai réfléchi à une possibilité de réorientation et j’ai repensé au métier de Conseiller d’Orientation Psychologue ; du coup, je me suis vraiment remobilisée de façon positive autour de ce projet en préparant le concours et en me donnant les moyens de le réussir.
Puis j’ai repris des études, rédigé un mémoire et passé le Diplôme d’État de Conseiller d’Orientation Psychologue (DECOP), ce qui s’est révélé plus difficile que je ne l’avais pensé. Ensuite, en tant que fonctionnaires, nos affectations se font de façon administrative, par jeu de points, sur des vœux que nous formulons. J’ai eu la chance d’obtenir un premier poste sur l’académie de Toulouse dès la sortie de la formation, à St-Gaudens, situé dans mon département, mais loin de chez moi. Mon emploi actuel, au Centre D’information et d’Orientation (CIO) du Mirail avec le mi-temps au Service Commun Universitaire d’Information, d’Orientation et d’Insertion Professionnelle (Scuio-IP) de l’Université est un poste qui fait l’objet d’un mode de recrutement différent que l’on appelle « poste à profil ». Il y a publication d’un profil de poste et puis candidature, entretien. (…) . Travailler à l’université, était un de mes projets. Quand j’ai appris au cours de ma formation qu’il y avait la possibilité d’être détachée à l’université, je m’étais dit que, vraiment, c’est quelque chose que j’avais envie de faire dans ma carrière. Cela s’est présenté assez tôt et j’ai eu la chance d’être sélectionnée. »
De la formation à l'emploi... une correspondance ?
« La formation universitaire de psychologue, en tout cas avec un DEA ça c’est clair, me semble insuffisante à elle-seule pour exercer en tant que psychologue. C’est un peu comme le permis de conduire au temps où je le passais moi : on a le droit de conduire mais on ne sait pas le faire.
Beaucoup de choses m’ont manqué dans ma formation mais c’est aussi parce que je les ai évitées. J’étais très attirée par l’enseignement théorique académique universitaire, et puis il y avait aussi la posture un peu idéologique d’une partie de l’équipe de l’université… Moi tout ce qui était « outils », par exemple la psychométrie, c’est quelque chose que j’ai peu investi… J’ai fait le minimum requis, mais je ne suis pas allée vers la clinique « armée ». Donc, il semble qu’au niveau pratique il manque des choses, qu’il faut continuer à se former et à construire des choses. Prendre la posture du psychologue ça prend du temps. Je pense qu’il y a un chemin à faire une fois que l’on est sorti pour construire sa place et sa posture de psychologue.
Les choses dont je me suis servie ? Des cours théoriques et des cours cliniques qui prennent sens petit à petit, c’est dans l’aller-retour que cela finit par prendre sens ; il y a des concepts, des théories que j’ai appris et je n’y mets plus le même sens. On continue à y revenir, ça fait trace. Après, j’ai beaucoup pratiqué l’observation : je travaillais sur l’observation de recherches, puis je me suis tournée vers l’observation clinique ; j’ai pu le faire à la fois en travaillant et en lisant.
Ce dont je me sers aujourd’hui, dans mon métier de PsyEN… J’ai une deuxième formation (DECOP) qui m’a permis de mesurer ce que la première m’avait apporté. Je crois que la psychologie du développement, c’est quand même un point essentiel, l’appropriation de ce que cela peut être qu’un être en développement. Au début, c’est un peu schématique et puis petit à petit, cela prend sens. C’est peut-être plus vrai dans la partie PsyEN en établissement. Je pense que c’est intégré dans mes modes de pensée.
Je pense qu’il y a aussi des représentations de ce qu’est un être humain et de comment il fonctionne psychiquement que j’ai construites au cours de ces années d’études. »
Les conseils à donner aux étudiants ?
Profiter de ces années-là ! Parce qu’après, on a moins le temps de revenir aux bouquins alors que l’on en aurait besoin mais on ne le fait pas forcément. Donc je trouve que ce temps d’immersion dans un champ théorique un peu pointu est quand même intéressant. Je suis sûre qu’il est ensuite profitable : cela donne, même sans que ce ne soit forcément explicite, des clés de lecture et un certain goût pour pouvoir y revenir et réactualiser des choses. Les savoirs se périment et se renouvellent. Après, il faut se poser la question, peut-être en amont, de poursuivre ou non sur un doctorat. Et si l’on sent que ce choix-là n’est pas très clair, il me semble que c’est intéressant de profiter de cette année de master recherche et peut-être aussi, dès les premières années, d’explorer les champs professionnels dans lesquels l’on pourrait exercer, de rencontrer des professionnels, de faire des stages. Ne pas hésiter à aller voir des professionnels, demander des entretiens. C’est demandé, à certains moments du parcours, cela fait partie du travail étudiant, mais on a le droit et on peut le faire sans commande académique. C’est compliqué de repérer les fonctions, les institutions, les employeurs potentiels. Je pense qu’on a le droit en tant qu’étudiant de ne pas savoir. On a le droit aussi d’aller voir de façon un peu exploratoire, sans avoir forcément soi-même un projet très précis, ou un ancrage théorique affiché extrêmement construit. Donc voilà, il faut oser faire ça. Je pense que c’est important pour pouvoir ensuite construire son parcours de façon plus réfléchie et être le moins possible soumis aux opportunités. Cependant, les opportunités permettent aussi d’avancer… Voilà, c’est ce que je conseillerais !